Au cours de l’Âge Céramique (500 BCE – 1500 CE), les rats piloris des Petites Antilles (tribu Oryzomyini) constituaient une partie importante de l'alimentation des Amérindiens des Petites Antilles. Les fouilles archéologiques sur la totalité des îles de l'archipel ont abouti à la découverte de grandes quantités de vestiges de ces taxons aujourd'hui disparus.

C’est une occasion unique d'étudier la biogéographie passée de ces animaux d'une grande importance culturelle et écologique. Nous avons étudié 1140 premières molaires inférieures provenant de 40 sites archéologiques datés de l'âge Céramique et répartis sur onze îles de l'archipel des Petites Antilles en utilisant des approches de morphométrie géométrique pour étudier la variation spatio-temporelle (archéobiogéographie) des populations.

Cette étude a permis d’identifier trois groupes morphologiques, présents au cours de chacune des périodes chrono-culturelles, géographiquement limités et cohérents avec les lignées mitochondriales publiées auparavant.

Ces trois groupes géographiquement séparés représentent probablement trois genres distincts de rats des rizières. Le premier groupe comprend des spécimens du nord de l'archipel (Saint-Martin, Saba, Saint-Eustache, Saint-Kitts et Nevis) et probablement désigné sous le nom de Pennatomys sp. ; le second, présent dans le Sud (Martinique) est attribué à Megalomys desmarestii ; et le troisième correspond à des spécimens du centre des Petites Antilles (Antigua, Barbuda, Marie-Galante et Guadeloupe) et correspond probablement à Antillomys sp.

Ces morphotypes d’Oryzomyini sont présents pendant toutes les périodes étudiées ce qui confirme la présence continue de ces rongeurs dans la région. Nos résultats sont en accord avec les études moléculaires et renforcent l’hypothèse d'une introduction naturelle du groupe dans l'archipel avant l'installation des populations humaines. De plus, l'homogénéité phénotypique et la stabilité observées sur les 2000 ans de l'occupation précolombienne suggèrent que les rats piloris ne faisaient pas partie des échanges inter-îles à longue distance par les humains. A contrario, la consommation humaine de rat des rizières était probablement basée sur la chasse in situ des populations locales.

Marine Durocher, Violaine Nicolas, Sophia Perdikaris, Dominique Bonnissent, Gwenola Robert, Karyne Debue, Allowen Evin and Sandrine Grouard, 2020. Archaeobiogeography of extinct rice rats (Oryzomyini) in the Lesser Antilles during the Ceramic Age (500 BCE–1500 CE). The Holocene, 1 –13.

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03045458

Publié le : 08/01/2021 14:14 - Mis à jour le : 08/01/2021 14:15